Je suis intervenu à plusieurs reprises dans des fils traitant de machettes, et j'avais dit que j'en parlerais de façon pratique un de ces jours.
Je montre ici plusieurs de celles que je possède : ce n'est en rien une "collection", mais bien quelques outils qui me servent et qui ont une histoire, et des propriétés et des usages différents.
De gauche à droite :
1) machette de marque Martindale, fabriquée pour l'Amérique du Sud. La référence actuelle est je pense 32-510-01. C'est la machette la plus utilisée par les saramakas, et qui est parfaite pour layonner (ouvrir un chemin dans la forêt), en raison du poids élevé en tête. Il est prudent de couper la pointe, afin de limiter les dégats sur la tête de celui qui suivrait de trop près le layonneur.
Je ne l'emporte que rarement, car elle est trop longue pour la porter à la ceinture, or j'utilise le plus souvent d'anciens layons que je n'ai qu'à rafraîchir si ils sont vraiment bouchés. Mais c'est un superbe outil.
2) machette sans doute aussi de marque Martindale, mais probablement fabriquée sous licence au Nigéria et commercialisée sous la marque Crocodile en Afrique. Je l'ai échangée contre une neuve à un villageois qui travaillait pour nous lors d'une mission scientifique à l'est du Cameroun. La forme est différente, car elle sert plus à l'abattis qu'à la forêt. On notera qu'elle est très usée, et a perdu au moins un tiers de la largeur de la lame, à la suite d'affutages répétés. Un de mes collègues en a obtenu une encore deux fois plus étroite, et s'en servait de couteau à gigôt !
Je n'aime pas trop ces machettes, la poignée est trop large pour moi, et la répartition de poids ne m'emballe pas.
3a, 3b, 3c) machette de marque Tramontina. De mémoire (je vérifierai) c'est une 19". C'est LA machette que je trimballe dans toutes mes expéditions ou presque. A sa droite (3b) un étui cuir (indispensable pour ne pas se blesser lors d'une chute). Portée à la ceinture dans son étui, elle ne gêne pas la marche, ce qui pour moi est essentiel.
C'est une machette un peu trop légère pour faire vraiment du layonnage, mais elle est parfaite pour rafraîchir un layon, ou se frayer un chemin avec un impact minimum sur l'environnement. 3c est juste sa petite soeur, attendant sans impatience la retraite de son aînée (on notera que la lame neuve est un peu plus large).
La poignée de la plus ancienne s'est fendue (en milieu tempéré, en utilisation "bourrin"). Je l'ai recollée, et l'ai cerclée d'anneaux de chambre à air de vélo, pour améliorer et le grip et la solidité (idem d'ailleurs sur 2) et 4) ).
4) machette thaïlandaise d'un style rappelant celui des kukris. Cette machette a une histoire amusante et un peu magique : je faisais des mesures d'indice foliaire dans une forêt de recru dans la réserve de Khao Yiai en Thaïlande avec une de mes étudiantes, et nous perdions un temps fou car nous n'avions ni l'un ni l'autre emporté de machette, comptant bien sur que l'autre aurait pris la sienne. Et c'était vraiment un taillis pénible. La forêt là-bas est semi-décidue, et le sol était couvert de feuilles couleur rouille. J'avançais en pestant contre ma connerie et l'incurie de ma collègue, quand d'un coup je me suis figé sur place, sentant quelque chose d'étrange. J'ai analysé cette impression, et ça m'a amené à baisser le regard. A un mètre à ma gauche. Là. J'ai écarté les feuilles, et il y avait cette lame, dans un état lamentable, de couleur feuille morte et aux neuf dixièmes couverte de feuilles mortes, avec un fil en dents de scie tant elle était rouillée.
Je l'ai affutée grossièrement avec un caillou, et elle nous a sauvé la journée. De retour au camp, nous avons appris auprès des villageois qu'elle avait été perdue plus d'un an avant par un vieil homme du groupe ethnique qui vit là, et que cet homme était mort peu après. J'ai proposé de rendre la lame à sa famille, mais ils m'ont dit de la garder, et que le vieil homme "me voudrait du bien". J'ai nettoyé la lame, l'ai réaffutée, et ai entouré le manche (un tuyau d'acier soudé à la lame) avec des bandes de chambre à air. J'aime bien cette lame, et par son histoire, et par son efficacité, mais je l'emporte rarement car je la trouve trop lourde - or je cherche à être le moins chargé possible quand je randonne pour le plaisir, mais aussi dans mes expéditions travail.
5) Ce n'est pas une machette à proprement parler, puisqu'il s'agit d'un cradoche 1,5 (commande spéciale) de Paolo Simoes. Je l'ai testée en décembre en Guyane, lors d'un petit raid en autonomie où je voulais être chargé le moins possible, et elle fait bien son boulot. Le faible poids empêche de l'utiliser comme la 1), et c'est pas une tranche d'impact, mais de glissement le long du fil qui se produit : c'est pour cela que le tranchant rectiligne est précieux, car toute l'amplitude du geste est utilisée, ce qui ne serait pas le cas avec une lame au tranchant courbé classique. C'est en fait mon second exemplaire, car j'ai offert l'original à un collègue qui avait été séduit.
Voici ma modeste contribution
...
EDIT : redimensionnement de l'image pour que le cradoche tienne sous affichage Linux, et deux ou trois typos